Après de longs mois d'absence, mon frère était enfin revenu dans la demeure des Corthese. Il avait ramené de ses périples dans les Indes de nombreuses épices colorés et odorantes. Il ne m'avait pas non plus oublié dans son long voyage, de beaux tissus aux couleurs Siam pour que je puisse lui tisser une fresque de ses récits d'aventures m'étaient destinés ; pour que ses fils, et ses petits fils puissent un jour être honorés du nom des Corthese et transmettre à leurs tour notre histoire à leurs descendance fière et nombreuse.
Nous avons bien festoyé ce soir là, moult mets et du vin en quantité fut servis pour l'occasion.
Je me suis endormie en repensant à tous ce que nous avions de souvenir en commun... Enfants, nous étions toujours en concurrence, l'unique fils et l'unique fille des Corthese, et je me faisais un point d'honneur de le battre même dans les disciplines masculines ; mais il me fallait user de discrétion, mon père n'aimait guère que je manipule les armes. Pour me tenir occupée, il m'offrit des cours de théâtre, où j'appris à imiter les cris d'oiseaux, la démarche d'un vieillards ou encore la voix d'un homme...
Je fus réveillée par un bruit si puissant que les murs en tremblèrent durant de longues secondes. Ma chambre était alors illuminée d'une lumière fauve et dansante venant de la fenêtre. Je me suis penchée à la fenêtre et j'ai pu admirer avec effroi un navire aux voiles de feu dans le quai d'Alicante, et ces voiles se gonfler pour enrober tout ce qu'elles pouvaient à portée de ses longs bras de chanvre enflammés dansant dans le vent de la nuit hispanique.
J'ai entendu les sabots du cheval de mon frère et de mon père sur le pavé de la cour accélérer vers la rue puis je le vis galoper vers leurs mort.
Plusieurs explosions ont suivies, et j'ai à mon tour rejoins les quai pour retrouver mon frère et mon père ; en vain. Je n'ai su que mettre la main que sur leurs chevaux errant dans les rues lourdes de fumée et quelques bribes de vêtements et leurs armes.
à mon retour au foyer familial, mes idées étaient de suie, en me débarbouillant devant ma coiffeuse, je me rendis compte du danger qui menaçait le castel familial : pas d'héritier mâle, le nom des Corthese allait disparaitre, ainsi que tous les biens de la famille, avalés par je ne sais quel prétendant aussi abjecte que vénal.
J'ai alors revêtu les apparats de mon frère et j'ai signalé a disparition du père et de la fille des Corthèse dans l'incendie du port d'Alicante.
J’œuvre aujourd'hui au nom de mon frère et de mon père pour que perdurent le nom des Corthese, et nul homme ne saura arrêter l'honneur qui me revient de porter le nom de ma famille.
_________________ Le nom des Corthese perdurera qu'importe que ce soit le sang ou l'encre qui se charge de marquer le parchemin de nos vies.
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