La clameur funeste s'élevait du fond de cette large vallée que l'on devinait, depuis la mer, et qui s'enfonçait très loin, dans les terres de Kathanie.
De son observatoire, Vittorio, crut apercevoir une large saignée noirâtre d'où s'élevaient des fumerolles et des cris de douleur.
L'agitation était à son comble, au commandement vénitien. Nombreux étaient les va-t-en-guerres qui mourraient d'envie d'aller se jeter dans la bataille à la rescousse du vieux Metterhoven. D'autres brûlaient de tester leurs nouvelles armes et de montrer que la modernité, seule, pouvaient parvenir à bout d'une telle bataille.
- Notre premier bataillon à pied et à cheval, envoyé auprès de Signore Metternhoven a essuyé comme les autres Kathaniens de sévères pertes !!! S'écria un messager...
- Voilà ce que c'est que d'avoir suivi ce vieux fou de Metternhoven, dans son obsession de guerre à l'ancienne ! S'indigna un capitaine. Si nous avions, Porca Madona, mené cette guerre, comme nous l'entendions, avec les outils de notre temps, rien de tout cela ne sera arrivé !
- Messieurs, messieurs, du calme, s'exclama Vittorio.
- Il nous faut agir vite et selon nos propres méthodes !!! Sans quoi les Kathaniens seront Turcs, ce soir ! Nous devons avancer dans la vallée et ouvrir un front sur l'arrière des troupes ottamanes. Lança un autre capitaine.
- Bombardons ! Bombardons tout ce que nous pouvons bombarder ! Lança le chef des canoniers...
- Messieurs ! Messieurs ! Reprit Vittorio. Nous allons positionner notre flotte et bombarder les arrières des troupes ottomanes... Dans le même temps, nous allons disposer nos canons, tous nos canons, sur les collines qui bordent la vallée et bombarder la bataille... Nous ferons de notre mieux pour tenter de n'atteindre que les turcs... Il y aura forcément également des pertes chez les Kathaniens mais comme dit un proverbe français : "on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs"... Ce faisant, nos troupe à pied et à cheval descendront prêter main forte à Metternhoven... Cet ordre s'applique immédiatement !
Et toutes les troupes se mirent en ordre de bataille.
Dès les premiers tirs des navires vénitiens, les arrières des troupes ottomanes furent atteintes, créant surprise et panique au coeur de la bataille... Puis les canons décimèrent les côtés et alors les troupes vénitiennes commencèrent à affluer, au sol... Quand ils parvinrent sur site, le gros de la bataille semblait avoir été consommé. Kathaniens et Ottomans s'affrontaient d'une façon qui trahissait la fatigue. Des milliers de corps jonchaient, de part et d'autre, le champs de bataille. Ce qui restait d'hommes se battait lourdement, comme au ralenti. La fraîcheur des renforts vénitiens eut tôt fait de sonner le glas des offensives ottomanes qui, pour la première fois, se mirent à reculer.
Au bout de deux heures, les ottomans sonnèrent la retraite et l'on commença à compter les morts... C'est alors que Vittorio, en armure et à cheval, s'avança pour la première fois sur cette scène qui semblait donner vie à l'apocalypse de Jean.
- Metternhoven !!! Où est Metternhoven !!! Criait-il.
Quand soudain une voix jeune lui répondit.
- Herr Vénitien ! Notre Maître est à terre ! Notre Maître est ici !
Tout l'état majeur accourut et forma un cercle autour du vieux chef Kathanien.
- CHIRURGIEN ! Hurla Vittorio...
Un vieil homme s'approcha, s'agenouilla auprès de Metternhoven. Le silence était pesant. Chacun attendait la sentense.
- IL VIT ! S'écria le vieux médecin, d'une voix tremblotante. Notre bon Duc est vivant et par Dieu, il est victorieux !
- Alors qu'on le redresse ! Ordonna Vittorio.
- Je ne crois pas que ce soit recommandable, Signore, reprit le chirurgien. Une plaie béante dévore sa jambe droite... juste dessous son genou... Je crains que nous dussions le transporter dans ma tente et que nous dussions l'amputer ! Sans cela, notre Maître risquerait fort de perdre la vie...
Un crissement se fit entendre au coeur de l'armure du vieux Duc...
- Taisez-vous ! Lança Vittorio. Il est conscient ! Il est conscient ! Il parle ! Il veut nous dire quelque chose !
Tous s'approchèrent du visage de Metternhoven et retinrent leur souffle pour entendre ce qu'il avait à dire...
_________________ Secrétaire du Sénateur Arimondo. Fonctionnaire de la Sérénissime République de Venise.
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