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 Sujet du message: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Janvier 28th, 2013, 12:06 am 
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Depuis son navire, Le Vénitien Arimondo fit adresser une missive à Fiorenza Della Rovere concernant leur entrevue d'Insula.
Les armes et hommes envoyés à la défense du domaine de Fiorenza devaient servir l'évacuation des victimes de la révolte d'Urbino et de Pesaro.

Venanzio Arimondo a écrit:

Ma chère Fiora,

J'espère que nos premières livraisons comportant lances, plastrons divers, chevaux, et austres coffres dEcus d'Or, vous aurons été profitables, mais j'espère également que la division de Six spadassins d'élite, formés en nos meilleures écoles de guerre Vénitiennes, et envoyés pour renforcer les défenses de vostre domaine, seront du bon goût de nostre Amy Giuliano. Armés de fines et longues lames, je doute que vostre bon secrétaire ne fasse longtemps fine bouche devant leur mâle assurance...

Je ne mettrai point cependant ma langue à couper pour dire s'ils sont experts ou non en l'art du cunilingus, n'ayant pu, en ce sens, et vous l'imaginez aisément, les expérimenter moi-même...

Par ailleurs, toujours animé de cette volonté de rapprochement, d'aucun dira d'attouchement, je pense qu'il est opportun de vous envoyer ce jour, en supplément, un galion de guerre. Vous le trouverez ainsi dans les prochaines heures, mouillant, mais point lubrique pour autant, dans vostre port... Ce galion battra pavillon gênois et son commandement vous reviendra... Il sera Gênois dans vos eau et Vénitien dans les miennes. Il servira ainsi à faciliter nos échanges mais également à faire fuir ceux qui ne peuvent vraiment point rester sur des terres Gênoises réprimées par ses princes...

Dans l'attente de vous revoir et de pouvoir goûter, avec délice, à votre sensualité, fut-ce dans ses recoins les plus intimes et inattendus...

Bien à Vous.

Seigneur Venanzio Arimondo De Treviso. Patricien et Citoyen Électeur de la Sérénissime République de Venise.



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Dernière édition par Venanzio Arimondo le Janvier 29th, 2013, 11:14 pm, édité 1 fois au total.

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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Janvier 28th, 2013, 11:01 pm 
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Nul ne savait encore, à cette heure, que l'an 1573, serait pour les peuples d'Urbino et de Pesaro, une horrible année de disgrâce.

En ce début d'année, un magnifique souffle de liberté s'abattait sur la Marche d'Italie. Un souffle divin, on aurait dit enthousiasme, doublé d'une soif si longtemps contenue qu'elle ne pouvait plus rester d'avantage inassouvie.
Cette soif de liberté, de prospérité méritée, de justice divine, cette foi dans les valeurs de la fraternité, de l'égalité et de l'amour du christ, aussi, c'était ce qui pour l'heure, malgré tous les risques encourus, rassemblait les foules immenses autour des principaux lieux d'échange d'Urbino et du Conseil Général. Cette soif que chacun sentait sur le point d'assouvir, ce sublime espoir, emplissaient les cœurs, tant et si bien que la rudesse de cet hiver neigeux ne semblait plus avoir prise sur les corps.

La hausse des impôts avait été, pour la majorité du peuple, le prétexte au déclenchement de cette révolte, vers la fin de l'année 1572. Oh certes, la volonté d'avoir un peu plus de pain, de fromage, de vin, à chaque repas, par la diminution de certains impôts, était bien une réalité mais ce qui dominait, par dessus tout, c'était sans doute l'espoir en un avenir meilleur, pour soi et surtout pour sa progéniture. Un espoir qui ne trompait pas quand il se mesurait aux flots de paroles et de revendications qui inondaient le Conseil Général. Partout, les gens s'emparaient de la parole, actaient leurs doléances. L'un d'eux hurlait son besoin à la face de Dieu et tous les autres reprenaient sa parole en chœur. Il y avait ici un feu magnifique qui était en train de prendre !

La hausse des impôts, ordonnée par le Duc Della Rovere pour éponger les dettes de son duché, avait été le prétexte à ce vaste soulèvement populaire qui couvait en réalité depuis fort longtemps. Il suffit donc de peu pour que les intérêts de l'élite bourgeoise marchande rejoignent ceux du reste du peuple. Ce peu, c'était une hausse des impôts... Le peuple avait besoin d'un prétexte pour exploser. Aussi quand la bourgeoisie lui en fournit un qui la mouillerait à part égale, il n'hésita pas. Il saisit l'opportunité et explosa superbement.

Le jeune Valerio avait Onze ans et pour lui, comme pour sa bande de copains, cette révolte ressemblait à un grande fête populaire qui ne s'arrêtait pas. Que cette fête indéfinie lui semblait belle et riche ! C'était comme si la foire de Pâques avait débuté pour Noël et ne s'arrêterait plus ! Chaque soir, Valerio priait secrètement pour que tout cela continue le plus longtemps possible.

Valerio était le fils du tailleur de Pierre Massimiliano. Sa mère était morte en couche, à sa naissance. Il passait ses journées d'enfant de 11 ans à aider son père et à apprendre son futur métier de tailleur de pierres. Secrètement, Valerio rêvait de devenir bâtisseur, voire architecte, et de pouvoir ériger à Gênes ou Venise, le plus beau Palazzo de tous les temps... Il savait néanmoins que sa modeste condition et son hérédité populaire ne lui autoriseraient jamais un tel avenir. Il s'y était résolu à dire vrai. Mais il lui arrivait, à la tombée de la nuit, de tailler de magnifiques palais miniatures dans quelques déchets de marbre. Depuis le début de cette révolte, le jeune Valerio voyait ses rêves d'architecture ressurgir. Et puis, Bichio, ce maçon, ami de son père, celui-là même qui s’enfermait dans le clocher pour sonner l’appel au conseil général, ne disait-il pas qu'il était temps de rebâtir la république, ici et maintenant, d'élever des palais au Bien Commun, des lieux magnifique, à la gloire du savoir et de Dieu, où chacun pourrait s'émerveiller et prospérer ? Valerio ne ratait aucune de ses assemblées, avec ses amis. Ils ne rataient jamais une occasion d'hurler de concert avec les adultes, même s'ils ne comprenaient pas toujours ce qu'ils disaient. Ils comprenaient la soif de liberté et c'était là l'essentiel.

Comme tous les après-midi, la foule s'était amassée au Conseil Régional et les discussions, les cris, les rires, avaient repris.


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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Janvier 30th, 2013, 12:12 am 
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Depuis deux semaines semaines, la neige ne cessait de tomber sur la région des Marches, et la communauté paysanne souffrait d'un hiver qui s'annonçait long et rigoureux.
Le domaine administratif de Pesaro, géré par Fiorenza Della Rovere, commençait tout juste à se développer favorablement que de nombreux problèmes s'imposaient, au-delà des évènements de la révolte.


L'enceinte, dit la comtesse à Giuliano en constatant l'état des murailles. Le mortier peine à tenir les pierres et certaines ont chuté au niveau du mur est. Il faut renforcer les talus. Si nous subissons une attaque aujourd'hui, nous serons massacrés...

Très bien, nota le secrétaire, je réunirai les artisans tailleurs de pierre pour leur faire part de cette urgence.

L'homme fronça alors les sourcils en remarquant une agitation des gardes près de l'entrée du domaine.

Que se passe-t-il?

Ils approchèrent, intrigués, et se retrouvèrent face à un convoi constitué de six chevaux, six spadassins en armes et quelques carrioles visiblement chargées. Le messager, vêtu comme un métayer, tentait de s'expliquer aux soldats réticents.
En voyant Fiorenza arriver, le jeune homme fut soulagé et l'interpella.


Ah, signora, vous voilà, c'est parf...aah !

il se plia en deux sous le choc. On venait de lui flanquer un grand coup de pommeau dans les côtes.

Ne t'adresse pas à une patricienne comme ça, bouseux !

Laissez-le tranquille! tonna la comtesse en s'interposant. Qui êtes-vous et que venez-vous faire ici?

Ma Donna, je pensais que vous seriez au courant. Mais mon Seigneur avait prévu le coup, au cas où sa lettre ne vous parvienne pas...

D'une main hésitante, il fouilla dans sa besace pour en retirer une lettre cachetée. La jeune femme l'ouvrit et la lut attentivement. Très vite, un sourire naquit sur son visage.

Et vous avez réussi à passer le duché d'Urbino en trompant les soldats de mon père? Je salut cette performance.

Elle s'approcha de l'une des carriole et leva le drap qui la recouvrait pour révéler une coquette cargaisons d'armes.

Messieurs, vous êtes les bienvenus ! Entrez et prenez vos aises. Je vais demander à ce qu'un repas chaud vous soit servi.

Elle passa les murailles et Giuliano la rattrapa alors que le convoi pénétrait dans le domaine.

Signora, comment pouvez-vous leur faire confiance? Ce peuvent être des espions à la solde de votre père !

Oh que non, Giuliano... Elle lui tendit la lettre. Il ne s'agit que de la promesse tenue d'un accord passé aux chandelles. Celui-là même qui s'est déroulé lors d'une soirée que vous avez, vous-même, particulièrement appréciée... Faites-moi le plaisir de dire aux hommes d'armes de rejoindre l'Ecole de Guerre.

Elle fila sans l'attendre, un sourire aux lèvres, tandis que les spadassins s'arrêtait devant lui.
Le secrétaire replia la lettre et maugréa dans sa barbe.


Au diable Venise...

Un peu plus tard, Fiorenza répondit au donateur du convoi.

Citer:
Signore Arimondo,

Ce matin même, j'ai, en effet eu le plaisir de voir débarquer en mon domaine votre généreux convoi. Je dois avouer que cela me fait d'autant plus plaisir que vous êtes un homme de parole et il n'y a guère plus délicieux que quelques montures, hommes, lances et lames, livrées dans le secret de la clandestinité.
Mon... ami Giuliano, a tout d'abord considéré d'un œil suspicieux vos spadassins mais il les a rapidement envoyé rejoindre les rangs de nos soldats. Quant à leurs compétences particulières, vous serez étonnés d'apprendre que vos hommes ont, pour la plupart, femmes et enfants et que la courtoisie de leurs manières n'a d'égale que la fidélité qu'ils portent à leur ménage. Je suis même persuadée qu'au moins trois d'entre eux sont des vétérans...

Alors, homme de parole mais aussi soucieux de ne point me filouter. Voilà quelques valeurs que je ne saurai vous retirer expressément.
Cependant, il s'agit là d'une donation répondant à notre accord et si je vous suis matériellement redevable, les affaires liées à ma couche sont d'un ordre tout à fait différent.

Menons à bien l'évacuation et la protection des civils. Il est encourageant de voir qu'une division vénitienne ait pu passer les contrôles de la garde ducale sans coup férir.
Puis-je espérer vous avoir à mes côtés pour superviser les transferts?

Bien à vous,
"Fiora"

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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Février 3rd, 2013, 5:33 am 
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La neige était tombée toute la nuit par bourrasques et formait de nombreuses congères qui recouvrait des pans entiers de maisons. Le ciel semblait s'être vidé de toute la semence de Dieu. Un ciel azur et apaisé. Le froid était sec et supportable. Seuls les enfants semblaient s'en réjouir. Chez les adultes, on se demandait surtout comment on allait bien pouvoir tenir si ce temps perdurait...

Le jeune valerio avait improvisé une luge avec une vieille planche et s'amusait à dévaler la pente qui reliait la carrière de la petite maison de son père. Deux de ses amis l'avaient rejoint et quand l'un d'eux exigea la planche pour glisser une fois de plus que ses camarades, cela déclencha une mémorable bataille de neige.

- Valerio ! Cesse tes bêtises, tu vas attraper la mort, Porca Madona ! hurla son père par la fenêtre, en contre-bas... Et préparez-vous donc Bruta bestia ! On doit aller donner un coup de main à Bichio, pour préparer l'assemblée !

Valerio maugréait mais il s'exécuta.

Dans la grande salle qui servait d'assemblée, l'humeur était plutôt joyeuse. Il y faisait chaud et la soupe aux oignons migeotait dans un chaudron, posé à même le foyer de la grande cheminée. Depuis le début de la révolte, la solidarité s'était installée et tout le monde, sur ses réserves pourvoyait au bien de la petite communauté. Même si le marchand Ernesto, improvisé trésorier de l'assemblée, et pessimiste de nature, passait ses journées à maudir les gaspillages des ses semblables, prédisant toujours un épuisement des ressources et une famine pour le lendemain, pour l'instant, tout semblait en bon ordre...

- Bichio, Alors, tu n'as pas encore sonné la cloche ? Lança Massimiliano, le père de Valerio, à son ami qui touillait la marmite de soupe.

- Mondo Cane ! Je dois tout faire ici !

- Laisse donc la soupe à qui sait la faire ! Tu vas nous faire manger du ciment, si tu continues...


Bichio fronça les sourcil et tourna les talons sans mot dire en direction du clocher...

C'est alors que des applaudissement retentirent. Valerio se hissa sur la pointe des pieds pour voir qui méritait ainsi qu'on l'applaudisse. Il y avait là un homme qui semblait en tenue de notable accompagné d'une dame et d'une fillette de l'âge de Valerio.

- Gloire au Conseiller Callisto Remigio, à sa Dame Salvina et leur fille Amalia ! Hurla un homme, dans la foule.

Remiglio était l'un des notables les plus influents d'Urbino. Jadis apprécié du prince Della Rovere, il avait peu à peu été conquis par cette cause populaire. Les mauvaises langues prétendaient qu'il s'agissait d'une manoeuvre et qu'il avait des prétentions sur le duché au cas où il s'affranchirait mais ils y trouvaient aussi un argument de réconfort. En effet, si un homme de l'envergure de ce Remiglio rejoignait les révoltés, c'était forcément qu'ils étaient sur le point de l'emporter.

Valerio dévisageait la fillette blonde. Elle lui parut fascinante et il se sentit soudain bien sale et mal habillé.

Remiglio s'avança sur l'estrade.

- Mes chers amis, peuple d'Urbino, je me joins à vous, en ce matin ! Vostre cause est noble. Aussi, nous allons tous, nous, nobles, citoyens, marchands, paysans, tous les enfants de Dieu, faire en sorte que nostre jadis bon Duc entende raison !

La foule quasi-unanime fit une ovation au Conseiller qui fut invité à partager avec les autres son bol de soupe... D'abord hésitant, l'homme prit néanmoins son mal en patience et se dit qu'il fallait faire quelques sacrifices pour espérer s'imposer plus tard à la tête de la communauté... Il saisit le bol du bout des doigts et y trempa ses lèvres en réprimant un air de dégout...

- Tu vois, Valerio, fit Massimiliano à son fils Valerio, c'est une belle chose que tous soyons rassemblés ici pour un espoir de meilleur vie, sous le ciel de Dieu. N'oublie jamais cet instant... Mais n'oublie jamais non plus que ces gens, ceux qui se transmettent terres et pouvoir depuis l'antiquité, feront toujours tout pour ne rien partager... Tout. Même à se faire les avocats du peuple quand ils sentent devoir le faire... Mais qui sait ? Cette fois-ci peut-être que ça va changer... Et peut-être que toi aussi, un jour, tu seras un notable, peut-être que tu auras la chance d'être un architecte que toutes les grandes cours d'Italie et d'ailleurs s'arracheront ! Tu ne devras jamais oublié d'où tu viens, alors, Valerio. Tu ne devras jamais oublié ces journées, non plus.

Valerio ne comprit pas tout mais acquiéça. Pour la première fois, les volontés exprimées de son père à son sujet rejoignaient ses propres rêves. Il se sentait heureux. Il alors fixa la petite Amalia et se dit qu'un jour, il n'aurait pas honte de lui être présenté.


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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Février 3rd, 2013, 7:02 am 
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La flotte du Vénitien avait stoppé sa route aux larges de la Marche. On ne voyait de la côte qu'une ligne de crête bleue. C'était donc là que se trouvaient Urbino et Pesaro, deux cités en proie à la révolte de ses habitants et sans aucun doute au courroux de son prince. Le Vénitien observait cette côte à travers le prisme de sa longue vue ottomane et il se prit à songer qu'au beau milieu de cette immensité, s'activait Fiorenza Della Rovere. Il l'imaginait avec une certaine bienveillance et cette pensée eut un effet enchanteur sur son humeur matinale.

- Où en sont nos livraisons à nostre bonne amie, Dame Fiorenza, demanda-t-il à son jeune secrétaire.

- Une missive de ladite Dame vous a justement été adressée, par pigeon voyageur, ce matin. La voici, mon Seigneur. Répondit le jeune homme en lui tendant le message.

Signora Fiorenza Della Rovere a écrit:
Signore Arimondo,

Ce matin même, j'ai, en effet eu le plaisir de voir débarquer en mon domaine votre généreux convoi. Je dois avouer que cela me fait d'autant plus plaisir que vous êtes un homme de parole et il n'y a guère plus délicieux que quelques montures, hommes, lances et lames, livrées dans le secret de la clandestinité.
Mon... ami Giuliano, a tout d'abord considéré d'un œil suspicieux vos spadassins mais il les a rapidement envoyé rejoindre les rangs de nos soldats. Quant à leurs compétences particulières, vous serez étonnés d'apprendre que vos hommes ont, pour la plupart, femmes et enfants et que la courtoisie de leurs manières n'a d'égale que la fidélité qu'ils portent à leur ménage. Je suis même persuadée qu'au moins trois d'entre eux sont des vétérans...

Alors, homme de parole mais aussi soucieux de ne point me filouter. Voilà quelques valeurs que je ne saurai vous retirer expressément.
Cependant, il s'agit là d'une donation répondant à notre accord et si je vous suis matériellement redevable, les affaires liées à ma couche sont d'un ordre tout à fait différent.

Menons à bien l'évacuation et la protection des civils. Il est encourageant de voir qu'une division vénitienne ait pu passer les contrôles de la garde ducale sans coup férir.
Puis-je espérer vous avoir à mes côtés pour superviser les transferts?

Bien à vous,
"Fiora"


- D'après les dernières missives que nous avons reçues de nos hommes présents sur le domaine, poursuivit le jeune homme, nos cargaisons lui sont bien parvenues. Quant au navire que vous lui avez missionné, il bat désormais pavillon Gênois dans le port le plus proche de son domaine et il est sa propriété officielle... Devons nous le rejoindre ?

- Non, nous allons laisser quatre de nos navires ici même et avec l'une de nos galéasses, pour ne point attirer les soupçons, nous allons mettre cap sur Urbino. Nous jouerons ce que nous sommes habituellement, des marchands de Venise, faisant escale... J'embarquerai sur cette galéasse... Je veux par moi-même être témoin de ce qui se joue là bas. Puis de là, je me rendrai à cheval chez Dame Della Rovere.

- Il me semble, mon Seigneur, que vous sous-estimiez le danger à se rendre à Urbino, par ces jours.

- Mon jeune ami, crois-bien que le danger, je l'ai souvent bravé, il s'est souvent invité, parfois à ma table, parfois à ma couche... or je suis encore ici pour te parler, vois-tu. N’aie nulle crainte pour moi. Quant à toi, tu resteras sur la Galéasse. Je n'aurai besoin que de 6 cavaliers pour m'escorter. Nous voyagerons incognito et surtout sans signes ostentatoires vénitiens... De là, nous superviserons ce qui doit l'être, avec l'aide du Seigneur et... des plans du Grand Architecte.

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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Février 3rd, 2013, 7:31 am 
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Vers la fin de la matinée, une rumeur parcourut l'assemblée, suivie d'un certain effroi. On rapportait de toute part qu'ordre avait été nommé par le prince, lui même, d'envoyer la troupe sur l'assemblée.

- Mes amis, mes amis, du calme ! Nous avons des plans pour résister n'en doutez pas !
hurla l'un des meneur.

- J'avais bien dit que tout cela finirait mal...
bougonnait Ernesto.

Puis les cloches retentirent. Depuis le cloché, Bichio observa un important mouvement de troupes. Des bataillons de cavaliers, de lanciers, d'archers, d'arquebusiers ainsi que d'artillerie légère se rassemblaient tranquillement sur les collines dominant la cité. On pouvait observer sur certain d'entre eux le blason des Della Rovere et sur d'autres ceux de la papauté. Bichio descendit à la hâte pour annoncer ce qu'il avait vu.

Valerio ressentit pour la première fois de la peur.

- N'ais crainte, mon fils, ce n'est qu'une intimidation. Cependant, ce lieu ne sera bientôt plus un lieu pour les enfants... Alors tu vas rentrer à la maison. Tu vas t'enfermer, n'en sortir sous aucune condition et tu n'ouvriras à personne. M'as-tu bien compris ?

Valerio protesta. Il voulait rester auprès de son père. Cependant il dut céder face à l'insistance de ce dernier.


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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Février 5th, 2013, 1:04 am 
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Le jour suivant la livraison du convoi, Fiorenza fut alertée par ses éclaireurs. Selon eux, un pavillon mouillait dans le port du domaine.

Il arbore les couleurs de Gênes, signora ! Se pourrait-il que monsieur le duc d'Urbino ait...

Non, le coupa tranquillement la jeune femme. Mon cher père adore les entrées remarquées mais celle-ci ne correspond guère à ses méthodes. De quel type de vaisseau s'agit-il?

Un galion de guerre, signora.

Allons voir cela de plus prêt. Giuliano?

Comme si j'allais vous laisser y aller seule, ma donna...

Escortés de quelques hommes, la comtesse et son secrétaire franchirent les murailles au sud pour entrer dans le port. Quelques familles de pêcheurs et des dockers s'étaient rassemblés, émettant une rumeur excitée et inquiète en pointant le majestueux galion du doigts. Sur le pont, des ordres étaient lancés et des hommes s'activaient.

La mine déconfite mais l’œil impressionné, Giuliano émit quelques mots en secouant la tête.

Cet homme est fou...

C'est précisément pour cela que je fais affaire avec lui, répondit Fiorenza avec un large sourire appréciateur.

Signora Della Rovere, lança depuis le vaisseau un homme qui avait tout l'air d'être le capitaine. "Il Lupo di mare" est à votre service, avec les compliments de mon riche commanditaire !

Je n'ose imaginer ce qu'il m'en coûtera mais qu'il soit béni avec vous. En qui ai-je l'honneur?

Un pont de bois fut déployé jusqu'au quai et l'homme rejoignit la terre ferme, s'arrêtant devant la comtesse.

Mario Barat, signora ! Moi et mes hommes vous sommes dévoués selon l'accord en règle. Mais cela ne sera guère une torture que de m'y plier, vous êtes ravissante, si je puis me permettre.

De sa large pogne, il saisit délicatement la main fine sur le dos de laquelle il déposa, de ses lèvres de briscard, un baiser de gentilhomme.
Fiorenza le regarda, amusée, mais ne se départit guère de sa bienveillance circonstanciée.


Lieto di conoscerla. Soyez les bienvenus, mon domaine est modeste mais nous prendrons soin de vous offrir un séjour agréable. En attendant que vous repartiez pour Venise, je vous nomme capitaine en chef de ma flotte, monsieur Barat. L'aide maritime que vous incarnez arrive à point nommé, je dois dire...

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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Février 5th, 2013, 10:53 pm 
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Il y eu un moment de silence, perturbé par le seul son des cloches, le temps pour chacun des membres de l'Assemblée d'observer l'armée encerclant la ville. L'anxiété gagnait le cœur des meneurs de l'insurrection, et Callisto Remigio, parangon noble et impavide, sentit son cœur se serrer.

La garde Vaticane..., murmura-t-il la mâchoire serrée.

Ses yeux parcourent les hommes réunis, ces âmes qui désiraient une liberté légitime pour laquelle il s'était engagé, en dépit de ses anciennes allégeances. Nombreux seraient ceux qu'il verrait tomber ce jour-là mais la cause était belle et pouvait être gagnée...
Beaucoup de choses reposait sur lui, il le savait. Il était leur espoir, celui qui allait les mener vers la victoire.
S'ils échouaient à combattre pour se faire entendre, ils étaient perdus.

Messieurs, nous y sommes. Le jour que nous attendions autant que nous craignions est arrivé. Mais parlons-en de cette crainte! Voyez les bataillons qu'à rassemblé le duc pour nous écraser, oui, regardez-les bien! Je sens la peur étreindre certains d'entre vous mais ne croyez pas que parce que nous sommes en nombre inférieur, nous sommes condamnés ! Della Rovere a fait appel à l'armée du Pape pour commettre un crime contre son peuple mais Dieu sait reconnaître les valeureux! Je vous le dis à tous, Dieu est avec nous qui combattons aujourd'hui pour la liberté de nos droits !

Des acclamations s'élevèrent et Remigio du les couvrir pour continuer, galvanisé dans son discours.

Les cloches d'Urbino sonnent pour nous, il est temps de prendre les armes, messieurs ! Il n'y a plus d'autre alternative si nous voulons triompher, et je me battrai à vos côtés jusqu'à l'heure de mon jugement !

De nouveaux hourras retentirent, plus puissants. Le conseiller se tourna alors vers son épouse et sa fille qui, malgré leur dignité, retenaient des larmes.

Salvina, mets-toi à l'abri et veille sur Amalia. Si je devais ne pas revenir...

Non, je t'en prie...

Je dois le faire, c'est la voie que j'ai choisie, souviens-t-en. Je vous aime, toutes les deux...

Pour toute réponse, Salvina l'embrassa, réfrénant un sanglot, puis quitta l'estrade en emportant sa fille par la main.
Le conseiller prit une lente inspiration. Puis, son regard glissa une nouvelle fois vers les collines.


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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Février 6th, 2013, 3:24 pm 
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Sur les hauteurs d'Urbino, Salvatore De Tormes observait l'effervescence humaine gagner chaque quartier de la ville. Campé sur son cheval, en robe et armure, il attendait le bon moment pour déclencher le signal. Les armées vaticanes jouxtaient celles du duc, dans une enfilade mortelle.
Le nonce détacha son regard des centaines de fourmis humaines et le fixa sur son homologue laïque qui restait droit et fier comme une statue équestre d'Auguste.

Lequel de nous deux sera le premier berger?

Guidobaldo regarda vers sa direction et ne répondit rien, se contentant de sourire et d'incliner la tête. L'espagnol acquiesça tout aussi silencieusement et fit face à ses hommes.

Dieu et sa Sainteté vous regardent chacun pour ce que vous allez accomplir. Montrez-vous digne de l'honneur de rétablir l'ordre en leur nom.

Il effectua alors un ample signe de croix, destiné à l'ensemble des spadassins et de la cavalerie papale.

Vobis benedicimus, In nomine Patris, et Filii, et Spiritus Sancti.
Je vous absous pour les vies nombreuses que vous ôterez aujourd'hui et dans les jours prochains.
Que du plus noble au plus modeste d'entre vous n’oublie jamais, "Aime Dieu et va ton chemin".


Il tourna bride vers la cité et leva la main. Les hommes se tinrent prêts.

Allez...

Il abaissa la main d'un geste vif et les armées vaticanes se déversèrent sur Urbino.
De Tormes s'écarta pour rejoindre le duc. Un léger sourire barrait son visage.

Désirez-vous que je pardonne aux âmes de vos soldats pour les pêchés innombrables qu'ils commettrons? A ce propos, je tenais à vous préciser que le viol n'entre pas dans mes critères d'absolution, et cela n'a rien de papal, c'est un principe entièrement personnel...

_________________
Évêque de Tarragone
Nonce apostolique
Chancelier de l'Université de Salamanque


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 Sujet du message: Re: La révolte d'Urbino
MessagePublié: Février 6th, 2013, 6:13 pm 
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Le prince avait pour l'occasion revêtu son harnois d'apparat. On l'avait hissé à l'aide d'un palan sur sa monture, un solide cheval de guerre gris dont la couverture de selle arborait, d'une part, la bannière de Gênes et, d'autre part, le blason des Della Rovere. C'était en ces deux noms que le Prince Guidobaldo II rétablirait l'ordre, en ce début d'année 1573. Son cheval, s'ébrouait, naseaux ouverts, exhalant une fine fumée blanche à chacune de ses expirations. Ses hennissement contenus ressemblaient, par bien des abords, aux expressions de son Maître. Della Rovere se tenait en selle, avec droiture. On eut dit une statue.

Pour sûr, pas plus que les autres dignitaires présents, il ne se battrait. Il se délecterait de la bataille comme l'on peut se délecter d'une tragédie grecque. Il compterait les points, s'enthousiasmerait de ses avancées, maudirait l'ennemi de n'être pas moins tenace, donnerait des ordres, impassible. Mais ne se battrait pas. Il se tiendrait là, sur le sommet de cette colline, tel une statue sombre et figée, incarnation de la puissance divine de l'Etat, pour son siècle mais aussi pour l'éternité.

Il avait laissé l'avantage aux troupes papales afin de sonner l'envoie de la reconquête. Sans doute eut-il préféré faire différemment mais en ce monde, comme en ceux qui viendraient et ceux qui s'étaient éteints, l'on accordait toujours le plus grand privilège à celui qui tenait les finances.

Il inclina la tête pour recevoir la bénédiction du Nonce apostolique puis le toisa avec morgue.

- Que la paix du christ soit avec vostre esprit Mon Seigneur De Tormes.

Il exécuta un geste de la main et la troupe, comme un seul homme, se mit en branle. Opaque troupe faite de lanciers, fantassins armés d'arquebuses ou mousquets, de compagnies de couleuvrines, de canonniers, de cavaliers, restituant, dans un ordre figé, les couches immuables d'un corps social entièrement dévolu au divin chef. Le mouvement était lent et régulier. A voir descendre cette troupe, on eu dit un énorme et obscur flot qui lentement se déversait sur les pans des collines enneigées. Un flot macabre qui déferlerait sur la ville sans qu'on puisse l'arrêter.

Et en contre-bas, le peuple attendait le ras de marré, résigné mais résolu à l'affronter. Tentait de s'en protéger par barricades et prières. La prière étant, sans doute, l'arme qui lui était, en l'occurrence, la plus efficace.

- Vous réprouvez le viol selon vostre personne et vostre propre morale Seigneur De Tormes, lança-t-il au Nonce. Fort belle morale, j'en conviens. Cependant si vous ne la réprouvez au nom de Dieu et du Vatican, alors je ne le réprouverai point non plus et mes hommes qui, par le Seigneur, penseraient devoir rétablir la loi de Dieu par ces vils us, je ne pourrais non plus leur reprocher quoi que ce soit.

Il fixa la ville qui s'étendait à ses pied. Sa ville depuis toujours. Sa ville à jamais.


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